Quel est votre parcours ?
Lucas Froment : J’ai entamé mes études à l’École Nationale Supérieure d’Architecture (ENSA) de Marseille-Luminy en premier cycle, puis à l’ENSA de Paris-La Villette en deuxième cycle. J’ai ensuite travaillé dans des agences parisiennes « à la mode », mais je n’y ai pas trouvé mon compte pour de multiples raisons. Je me suis donc mis à mon compte en 2001. J'ai tout d'abord travaillé sur des projets de construction pour des entrepreneurs issus de l'immigration constituant une bourgeoisie émergente en Seine-Saint-Denis, mais aussi sur des projets plus modestes pour familles paupérisées
Et puis il y a eu cette rencontre avec la BSPP il y a quelques années. J’ai réalisé pour la Brigade un logement, puis deux… mais aussi des hangars, des cuisines industrielles ou encore des vestiaires de décontamination sur différents sites en Île-de-France.
Notre agence s’oriente vers ces grands comptes nationaux. Il existe une certaine philosophie de la maîtrise d’ouvrage qui nous convient, différente de celle des promoteurs et des particuliers. Nous essayons d’utiliser intelligemment le denier public. Le projet BSPP est donc aussi une démarche sociale et sociétale, dans la continuité de mes premières réalisations dans le 93.
Ce projet a-t-il changé votre regard sur le modulaire ?
Lucas Froment : Pour la réalisation de cette antenne médicale provisoire et ces hébergements pour "célibataires géographiques", le modulaire m’a été imposé. Au regard des délais très serrés, il était en effet impossible d’envisager une construction « traditionnelle ». Pour moi, c’était mon « baptême du feu modulaire » ! Je n’avais aucun a priori sur ce mode de construction, mais j’en connaissais les vertus, notamment cette fameuse rapidité d’exécution, cruciale sur ce projet.
Le Lieutenant-Colonel Thierry, responsable des opérations de construction au sein du Bureau de Soutien de l'Infrastructure (BSI) avait une expérience très personnelle avec ce mode de construction. Légionnaire de formation, il avait développé très tôt le « réflexe modulaire » pour ériger les campements militaires en un minimum de temps. L’Adjudant Nicolas, qui a assuré le suivi des travaux en tant que chargé d'opérations au sein du BSI, avait quant à lui eu une première expérience concluante avec Algeco à travers l’installation de modules dans le hangar d’entraînement des jeunes recrues.
Quels étaient les objectifs architecturaux ?
Lucas Froment : L’enjeu était avant tout esthétique car les modules sont destinés à rester sur un temps long. La position très en vue du projet, depuis la rue et au sein de l’enceinte militaire, appelait nécessairement une réalisation esthétique.
Comme pour tous mes projets, j’ai fait le choix d’une extrême rationalité dans la réalisation. Le modulaire est un process industriel très normé : je ne voulais pas trahir sa vocation et l’utiliser en sens contraire. J’ai donc aligné les modules de façon rigoureuse avec une circulation au milieu des deux ailes.
Cette circulation centrale répond à des symboles forts. Ainsi, souvent, les pompiers évoquaient la charge émotionnelle de la voûte en pierre éclairée par laquelle entrait toute nouvelle recrue au Fort de Villeneuve-Saint-Georges. On y pénétrait en civil, on en ressortait en Pompiers de Paris… en héros, en quelque sorte. J’ai donc recréé une voûte en guise de rappel de ce « totem », sublimée la nuit par des LED dont le rendu peut s’apparenter à une « voûte de feu ». Le côté mystique-mythique de cette voûte dans les âmes des pompiers m’a conduit à la mettre en valeur par un autre biais : un miroir au fond de l’allée centrale qui décuple la dimension du lieu. C’est dans cette glace que se voit le pompier-recrue : elle lui renvoie un certain statut, un destin à accomplir.
La voûte, la lumière, le miroir : ces symboles ont aussi pour ambition de frapper les esprits.
Commencer le modulaire avec Algeco, c’est une bonne formation…
Lucas Froment : Algeco a l’efficacité que l’on attend d’une « major », c’est aussi simple que ça. On est avec une entreprise de dimension internationale à l’origine de l’invention de la construction modulaire. On ressent immédiatement l’excellence et le savoir-faire des équipes. Chacun a un rôle bien défini qu’il maîtrise totalement. Avoir à ses côtés Algeco est un gage de réussite.
Personnellement, j’ai pris un vrai plaisir à « jouer » avec les modules. Les garde-corps rabattables pour obtenir un volume épuré, l'accord d'un bardage bois et d'un bardage métallique qui passe du gris au doré en fonction de la lumière, créant ainsi un élégant bâtiment « en mouvement ». Les possibilités presque infinies « d’emballage » de la structure modulaire Algeco offrent une grande liberté à l’architecte.
Selon vous, quelle place occupera le modulaire dans votre métier, demain ?
Lucas Froment : Avec ce bâtiment, nous avons « fait » de l’écoresponsable. Le modulaire Algeco est d’ailleurs par définition écoresponsable, ce projet en étant le parfait exemple. Les modules seront réutilisés, le bardage et le plateau central sont en bois, le parking est en pavés et les pompes à chaleur procurent un chauffage et un air frais décarboné. Les eaux de pluie sont collectées dans un réseau déployé sur l'ensemble du site : elles sont stockées et réutilisées pour les entraînements au feu.
Le modulaire est en phase avec la tendance du moment : créer une architecture jetable… que l’on ne peut plus jeter. Dans ce contexte, la capacité de reconfiguration et réutilisation des modules Algeco est un avantage majeur. C’est pourquoi ce mode de construction doit rester fidèle à sa vocation : des structures optimisées qui intègrent dès le début un agencement futur, calibré d’entrée.
Cependant, la construction modulaire doit selon moi « cranter » en termes d’ingénierie, le nerf de la guerre de l’architecture moderne. Celle-ci offre en effet aux usagers finaux plus d’efficacité, plus de productivité, plus de sécurité, plus de qualité de vie au travail et plus de qualité.
En l’occurrence, le modulaire Algeco a une belle carte à jouer car il part déjà avec de solides atouts, notamment en termes d’agilité dans la conception, de qualité et de facilité d’aménagement, mais aussi et surtout de maîtrise globale des délais, des coûts et de l’impact carbone. Autant d’attentes forcément dans l’air du temps chez tous nos clients !